Le cyberpunk a fait son retour officiel, l’année dernière, avec les sorties de Ghost in the Shell et de Blade Runner 2049 au cinéma et avec la sortie programmée du jeu vidéo Cyberpunk 2077 prévue autour de 2019. La photographie n’est pas en reste, bien au contraire. Dans les grandes métropoles asiatiques des groupes de photographes transforment les quartiers de Tokyo ou de Séoul en ode à l’esthétique cyberpunk et regroupent autour d’eux une communauté d’amateurs de plusieurs milliers de personnes sur les réseaux sociaux. Nous vous proposons de découvrir deux photographes inspirés par cette esthétique. Pour le premier diaporama nous avons invité Liam Wong, l’un des photographes les plus influents du genre. Il nous transporte à Tokyo au travers de son regard poétique, en clair-obscur.

EnterTheVoid
© Liam Wong
Cyberpunk – Quel est ce style si particulier qui a connu ses heures de gloire dans les années 80 avant de sombrer dans une douce somnolence et de retrouver un second souffle depuis 2 ou 3 ans ?
A l’évocation du terme cyberpunk, on tombe immédiatement dans les méandres de Blade Runner, film culte réalisé par Ridley Scott en 1982 et clé de voute de cette esthétique à la fois sombre et captivante, où l’humanité doit se questionner sur sa propre légitimité dans un monde ultra technologique.
Dans l’imaginaire collectif légué par le film, l’ambiance visuelle du style associe des villes tentaculaires, industrielles et ultra connectées à une nuit épaisse fragmentée par la lumière des néons.
Le cyberpunk nous parle d’un futur proche dystopique où le monde est contrôlé par la technologie et les grandes multinationales et où l’être humain tente de lutter contre un capitalisme tout-puissant dans des villes surpeuplées et polluées.
Le fanzine Cheap Truth de Bruce Sterlig et les œuvres des auteurs américains William Gibson ou Philip K Dick symbolisent cette contre-culture qui trouvera aussi un écho dans les mangas et anime japonais. Les cultissimes Akira, Ghost in the shell et Gunnm ont marqué toute une génération d’amateurs. Dans le courant des années 90, l’intérêt pour le style s’effrite. A l’aube des années 2000, les prédictions technologiques du cyberpunk occupent notre quotidien et le monde savoure cette euphorie internet sans vouloir en réaliser les dangers. Aujourd’hui, nous sommes à un tournant de l’histoire. L’intelligence artificielle est une réalité bien concrète, les robots entrent matériellement dans notre quotidien, les fakes news et le contrôle de nos données personnelles sur le net donnent des migraines, sans parler de l’état écologique de la planète qui nous fait nous questionner sur notre propre avenir. Le cyberpunk revient à l’horizon dans notre imaginaire comme dans notre réalité.

MemoriesOfGreen
© Liam Wong
Liam Wong, ses nuits tokyoïtes
Liam Wong a rencontré Tokyo en 2015, au cours de déplacements professionnels et s’est rapidement laissé envahir par la délicatesse de la capitale japonaise. Le photographe aime vagabonder dans les ruelles des quartiers tokyoïtes après minuit et jusqu’au petit matin, quand le rythme de la ville change, devient mystérieux et surréel. D’origine écossaise et chinoise, il a grandi en Europe, vit au Canada et voyage beaucoup pour Ubisoft, grande société du monde du jeux vidéo, au sein de laquelle il est directeur artistique. Son imaginaire contemplatif transforme les rues de Tokyo et crée une autre réalité, qui révèle à sa façon une des identités profondes d’une ville ultra moderne, ultra connectée, à l’avant-garde de la robotique. La beauté cyberpunk de la capitale japonaise ne pouvait pas échapper à Liam Wong : « J’ai toujours été un fan de cyberpunk au cinéma », nous explique t-il. « Pour moi, c’est le contraste entre l’ancien et le nouveau. Dans mes photographies, j’essaie de photographier l’intemporalité que nous voyons dans des films comme Blade Runner. Je me concentre principalement sur l’architecture et les silhouettes en conséquence. J’ai du mal à communiquer les choses verbalement – je suis une personne très visuelle et c’est l’une des raisons pour lesquelles j’aime la photographie et l’art – tout est ouvert à l’interprétation du spectateur. J’aime capturer les moments simples du quotidien et les rendre surréels. Des ruelles mystérieuses, des silhouettes vagues et des villes sans visage ».
Bien qu’inspiré par l’esthétique Cyberpunk, Liam Wong ne porte pas un regard pessimiste sur le monde : « Les images que je dépeins sont comme j’aime voir le monde – un endroit coloré et magnifique ». Des milliers de personnes le suivent sur les réseaux sociaux, fascinées par ce regard à la fois inspiré et unique qu’il pose sur la plus grande ville du monde.

MidnightCity
© Liam Wong

MinutesToMidnight
© Liam Wong
Par Jemina Boraccino
Photos : Liam Wong
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